Faso Soap, ou préventif Mousseux

Publié le par Miriam Fogoum

Faso Soap, ou préventif Mousseux

Peut-on enfin passer un savon au paludisme? Le chercheur Gérard Niyondiko s’est penché sur le problème en créant un savon antiseptique.

Langevin, Niyondiko, Barutel (LNB)
Langevin, Niyondiko, Barutel (LNB)

Le 25 avril 2016 s’est tenu le symposium sur le paludisme à Berne en Suisse. De nombreux thèmes et interventions se sont enchaînés pendant trois heures : comment renforcer la chaîne d’approvisionnement de lutte contre le paludisme ; comment soutenir la population dans le contrôle de cette affection, au regard des 3.2 milliards de personnes (soit près de la moitié de la population mondiale) qui sont exposées au risque de contracter le paludisme. Et, de l’autre côté de cet hexagone, un Burundais de 39 ans, chimiste de formation, Gérard Niyondiko se bat également pour la même cause : éradiquer ce fléau. Selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) l’Afrique subsaharienne supporte une part disproportionnée de la charge mondiale du paludisme. En 2015, 88% des cas de paludisme et 90% des décès sont survenus dans cette région. Pour contrer cela, l’ancien professeur de lycée met au point un savon innovant qui repousse les moustiques par son odeur, empêchant la prolifération des moustiques dans les eaux stagnantes : «270 millions d’africains n’ont aucune réelle protection contre cette maladie.» renseigne-il à nos confrères de France 24. 2013, a été pour ce jeune chercheur une année faste. Il remporte le prix mondial de la meilleure idée d’entrepreneuriat sociale à l’Université de Berkley grâce à son anti-moustique. Cette découverte offre l’espoir de réduire efficacement la propagation du paludisme en Afrique : «Nous voulons répondre aux besoins des populations, en utilisant des produits locaux. Ce qui peut générer des ressources supplémentaires pour l’alimentation et créer de l’emploi. » Continue le jeune homme. Et de cette envie découle une entreprise : Faso Soap «C’est une entreprise sociale basée au Burkina Faso dont l’objectif est de développer et commercialiser ce savon.» Nous informe Lisa Barutel membre du groupe et directrice de «La Fabrique», un incubateur d'entreprises sociales innovantes à Ouagadougou «Nous y accompagnons des entrepreneurs innovants, désireux de créer des entreprises pour contribuer à l'élan du continent.»

dans le laboratoire parle de son produit
dans le laboratoire parle de son produit

Et Faso Soap voit le jour

Imaginons une scène : un chimiste Burundais d’une trentaine d’année, fait face aux décès de nombreuses personnes autour de lui. La cause semble être la même, un paludisme sévère. Il décide après constat de mettre sur pied un produit accessible à tous ; un préventif tel qu’on en rêve, puissant moderne et surtout très peu encombrant. De la science fiction ? Certainement pas si on en juge par la matérialisation du produit depuis 2013: «Gérard Niyondiko a repris ses études en 2012 à L’institut International d’Ingénierie (2IE) de l’Eau et de l’environnement à Ouagadougou et son idée a évolué. » témoigne Lisa Barutel. Son contact avec Moctar Dembele étudiant dans le même institut, y est surement pour beaucoup. C’est ensemble qu’ils décident de transformer l’idée en un projet à fort impact social. Ces derniers sont rejoints par Franck Langevin Directeur de la campagne "100 000 Lives" au sein de l’affaire, pour finaliser la phase de recherche et de développement, structurer le business model de l’entreprise, regrouper les partenaires techniques et financiers et lancer la mise en production! Leur objectif est de rendre le produit financièrement accessible et « culturellement approprié. Car la moitié de la population à risque en Afrique reste sans protection. Il est urgent de trouver de telles solutions.» Avance monsieur Langevin. Après étude, les acteurs de cette production ont constaté que 95% des africains utilisent quotidiennement un morceau de savon.

Faso Soap, ou préventif Mousseux

Commercialisation à petit budget

Même si Moctar Dembelé décide d’abandonner le projet, le Burundais ne lâche pas prise. Gérard perfectionne son idée et renforce la start-up. Avec son groupe, il entreprend une collecte de fonds sur un site de crowdfunding afin de permettre le lancement de la production et de la distribution de ce savon très prometteur. Leur objectif est ambitieux: sauver d’ici 2018, 100.000 personnes du paludisme dans les 6 pays africains les plus touchés par la maladie infectieuse. En seulement neuf jours, la start-up a déjà collecté plus de 40.000 euros, et elle espère rassembler 100.000 euros au mois de mai. «La commercialisation n’a pas commencé. Le produit est encore à l’étape de prototype.» Avoue le groupe, « A vrai dire, il pourrait être commercialisé en l’état mais ce n’est pas l’ambition du projet. Faso Soap souhaite mettre sur le marché le savon le plus efficace possible pour éloigner les moustiques c’est-à-dire au moins pendant six heures après usage. » Certifie Lisa Barutel pour conclure. La composition de ce savon étant confidentielle, on saura toute fois qu’il aura une odeur de citronnelle et un mélange d’huiles essentielles répulsives et larvicides. Ce parfum n’aura aucun impact réel sur le prix du produit, le but étant de rester dans la gamme des savons de toilettes vendus aux populations. La directrice de «La Fabrique» tient à préciser : «Notre savon ne vient pas concurrencer les moyens de prévention présents sur le marché, mais bien compléter l’offre existante, en amenant une solution supplémentaire pour se protéger des moustiques.» Aucun vaccin contre le paludisme n’a été découvert jusqu’alors. Les moyens les plus efficaces aujourd’hui sont les moustiquaires. Cependant, pour être efficaces, elles doivent être bien utilisées : «pas être trouées, être correctement positionnées et être régulièrement imprégnées.» détaille Gérard Niyondiko. Selon médecins Sans Frontières (MSF), ces conditions ne sont pas toujours réunies et ne sont pas toutes accessibles à la population ; Les médicaments antipaludéens, coûtent chers, et ne peuvent être pris sur la durés car ils provoquent chez certains des effets secondaires. Aussi, en misant sur la prévention plutôt que la guérison, Faso Soap espère sauver le maximum de vie. C’est pourquoi, ils espèrent que les organisations publiques et même privées accompagneront la jeunesse pour faire face aux défis du continent.

Miriam Fogoum
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